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Compte-rendu de :

BABYLONIAN STAR-LORE: An Illustrated Guide to the Star-lore and Constellations of Ancient Babylonia, de Gavin White

par Patrice Guinard


New rev. ed. London: Solaria Publications, 2008 (first published in June 2007)
1 vol.., cm. 19 × 24, pp. 324 ; 169 black & white illustrations.
ISBN: 978-0-9559037-0-0. Paper € 18,95

Reviewed by Dr. Patrice Guinard, Independant scholar, Director of CURA.
 

English summary: For an English review of this book, see Houlding's one. Gavin White's essay is the first attempt to reconstruct the Babylonian star-map through its multi-millenarian star-lore, and to organize it as an ontological and cyclical, significant system, correlated with Mesopotamian mythology and cultural history.


L'ouvrage de Gavin White se présente comme un dictionnaire illustré des étoiles et constellations babyloniennes. Ce guide est l'une des premières tentatives de reconstruire le ciel babylonien autour de l'an 1000 BC., un ciel se composant de sept fragments en suivant le lever des constellations : celles du milieu de l'hiver, du printemps, de l'été, celles précédant l'équinoxe d'automne, celles de l'automne, de l'hiver, et enfin les constellations circumpolaires en relation avec l'outre-monde et l'intemporel (cf. aussi la reconstitution d'un ciel babylonien à la fin de l'été 2800 BCE par John Rogers dans son article de 1998).

Il n'existe que de très rares documents attestant de l'imagerie stellaire propre à cette culture multi-millénaire (c. 5000 - 65 BCE), notamment sur les kudurru, ces stèles royales attestant d'une donation de terres. L'auteur a dû interpoler certains éléments à partir du fameux "zodiaque" égyptien de Denderah et des 48 constellations grecques qui apparaissent chez Eudoxe (fragments édités par François Lasserre, Berlin, 1966) et dont Aratos de Soloi reprend le catalogue. White montre qu'un certain nombre de ces constellations grecques et égyptiennes s'inspirent et parfois transfigurent des constellations babyloniennes originelles (cf. le passionnant descriptif de cette reconstruction dans l'annexe 1, "Reconstructing the Babylonian Star-map").

La première organisation des étoiles par constellations serait sumérienne et daterait du Ve millénaire. Une réorganisation du ciel, en raison du déplacement apparent des étoiles dû à la précession des équinoxes, aura lieu au milieu du troisième millénaire. C'est l'objet de l'annexe 2 ("The Age of the Star-map") de tenter de reconstruire ce plus antique état du ciel mésopotamien, et de montrer les constellations qui auraient été conservées, celles qui ont été déplacées, et celles qui auront été éliminées (cf. la figure 169 p.261).

 
Sumerian sky, c. 5000 BCE
 

Le ciel babylonien s'inscrit dans un canevas général du monde, dans une représentation du "cosmos" à six étages, dont les trois célestes sont le monde inconnaissable d'Anu coiffant les deux mondes célestes moins inaccessibles, celui des dieux, puis celui, visible, des étoiles, planètes et constellations. En dessous figurent le monde terrestre et humain, le monde aquatique abyssal, et enfin le monde des morts, l'outre-monde qui communique avec les étages supérieurs.

L'importance du monde stellaire visible, objet de l'ouvrage qui a vocation d'en présenter le catalogue, provient de sa proximité avec le monde humain. Les étoiles sont plus proches de l'humain que ne le sont les dieux, elles en marquent la volonté et les désirs, et l'interprète des signes célestes peut y déchiffrer sa destinée et surtout celle des empires et des cultures qui se déploient sous sa coupe. L'organisation du ciel babylonien est à la fois une projection et un modèle des rapports sociaux, et un médiateur des desseins et impératifs divins.

Plus précisément, le repérage solsticial et équinoxial, qui nécessitera la réorganisation du ciel mésopotamien au cours du IIIe millénaire, justifie le déploiement du vivant (cycle de Dumuzi) et de l'histoire (épopée de Gilgamesh). L'univers ontologique mésopotamien est entièrement, définitivement et de part en part, imprégné du cycle solaire et de son déploiement au sein des constellations.

L'intérêt principal du texte de G. White est d'étudier ces astérismes dans leur organisation générale et cyclique. Le ciel babylonien n'apparaît pas comme un amalgame de facteurs sans interactions, ni comme un simple repérage et regroupement conventionnel d'étoiles, tel que l'est devenu le ciel moderne redéfini et délimité en 1920 par l'union astronomique internationale, mais comme un ensemble organique et cyclique qui nourrit l'activité humaine et en forge la destinée.

Les Babyloniens voyaient le ciel. En voyant le ciel, en se voyant dans le ciel, ils se comprenaient eux-mêmes, ils se voyaient tels que le cosmos les renvoie à leur propre être, i.e. à l'image d'eux-mêmes imprégnée d'une dimension cosmique, symbolique, et surtout ontologique.

C'est ainsi que les Babyloniens ont créé l'astrologie, ou plutôt les astrologies, les multiples formes de l'astrologie dont les ultimes avatars chaldéens, développés sous forme mathématique et calculatoire, ont été adoptés par les Grecs et les civilisations qui s'en sont inspiré.

 
Mul Gir-tab, the Scorpion
 

Gavin White établit le dictionnaire de ces constellations en rapport avec la culture mésopotamienne. Les noms sumériens y sont donnés sous leur forme picto-idéographique (pré-cunéiforme), traduits, expliqués, et leur équivalents akkadiens y sont joints. L'auteur cherche à comprendre l'enracinement culturel de chaque symbole, avec sans doute quelques spéculations qui ne se justifient pas, ou au contraire quelques interprétations plausibles en avance sur les travaux des assyriologues. Personnellement je regrette l'absence de notes et de références précises dans le texte, de datation des différents astérismes, et d'équivalence avec les noms modernes des étoiles. Ce manque est compensé par des annexes synthétiques qui exposent les principaux résultats des études académiques (Weidner, Pingree, Hunger, Parpola, Reiner, Rochberg-Halton, Papke, Brown, Koch-Westenholz, etc.).

Au final, il s'agit d'un ouvrage indispensable aux astrologues, pour les guérir de l'invasion récente des modèles astro-numérologiques hellénistiques et néo-hellénistiques tardifs, et les initier à la première véritable ontologie astrale, qui n'a ni équivalent ni succession au sein de l'aire culturelle occidentale.


Contenu de l'ouvrage:

Introduction
About this book
INTRODUCTORY MATERIAL
- The Babylonian Cosmos
- A Brief Guide to the Star-map
A-Z GAZETTE OF STARS & CONSTELLATIONS (pp.43-234)
APPENDICES
1. Reconstructing the Babylonian Star-map
2. The Age of the Star-map
3. Chronological Table
4. Textual Sources
5. The Writing System
6. Divination & Omens
7. Seasonal Cycle
8. The 12 Months
9. Constellation names used to represent the planets
10. Stellar associations to regions
11. Stellar associations to cities
12. The Four Winds
13. Identification between constellations
14. Coincident stars
15. Further reading
Index (p.309)
- Thematic indexes (p.317)


[Je remercie Gavin White qui m'a aimablement envoyé son ouvrage.]
 
 

Référence de la page:
Patrice Guinard: Compte-rendu de BABYLONIAN STAR-LORE de Gavin White
http://cura.free.fr/09-10/1002gavin.html
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